Samedi 21
mai, six membres du DSA (Bruno de
Bardonnèche, Arnaud Chatain, Philippe
Descamps, Cécile Eichinger, Isabelle
Kalinine et Leïla Shahshahani) ont rejoint le
guide Jean Bouchet (résident à
Chamonix) au pied de l'Aiguille du Midi, direction
les crevasses de la Vallée Blanche.
Programme de la journée : apprendre les
gestes de base pour évoluer sur glacier et
effectuer un sauvetage en cas de chute dans une
crevasse.
Petite mise en jambe, en deux cordées
et crampons aux pieds, pour la descente sur
l'arête déséquipée de
l'Aiguille. Le temps se dégrade et nous
décidons de perdre de l'altitude. Au niveau
du refuge du Requin et des crevasses et
séracs de la "Salle à manger", nous
posons pour le premier briefing : apprentissage de
l'évolution encordée sur glacier.
Principe de base selon Jean Bouchet : lorsque la
cordée est constituée de deux
skieurs, il faut conserver au minimum vingt
mètres de longueur entre eux, quitte
à avoir moins de rabe de corde dans le sac
(six mètres dans l'idéal). En cas de
chute d'un skieur dans une crevasse, et compte-tenu
de la vitesse, c'est ce qu'il faut en effet au
skieur resté en surface pour enrayer cette
chute. Dans ce cas, s'il n'y a du rabe de corde que
pour une seule personne, c'est le skieur amont qui
le conservera dans son sac. Si la cordée est
constituée de trois personnes et plus,
l'important cette fois ci est moins la longueur de
corde entre chaque participant que la longueur
totale de corde entre le premier et le dernier de
la cordée. Pour faciliter
l'évolution, les skieurs situés au
milieu peuvent se contenter d'être
reliés à la corde par un simple
système de
téléphérique. Evidemment,
lorsqu'on skie encordés, on veille à
ce que la corde reste tendue autant que possible.
Mise en pratique immédiate avec descente
dans la zone crevassée.
Vers 2250 m,
Jean Bouchet repère une crevasse pour
effectuer l'exercice de sauvetage. Dans un premier
temps, il balise une zone à l'aide de la
sonde dans laquelle nous pourrons évoluer
à pieds. Pour commencer, Jean fait le point
du matériel minimum mais indispensable
à porter sur le baudrier lorsqu'on
évolue sur un glacier, c'est-à-dire
le matériel qu'il faut avoir à
portée de main pour effectuer les premiers
gestes indispensables lors d'un secours en crevasse
ou pour s'en sortir si on est tombé dedans
(longe + mousqueton à vis + tibloc ou
minitraxion pour le système poulie bloqueur
; broche à glace + mousqueton à vis ;
sangle plate cousue + mousqueton à vis ;
machard). Précision : la longe ne sert que
si vous êtes le skieur tombé dans la
crevasse, soit pour vous faire remonter soit pour
mettre en place vous-même votre
système de remontée sur corde. Le
mieux étant de fixer le mousqueton à
vis de la longe au dessus du buste, par exemple au
niveau des épaules, de façon à
pouvoir y accéder facilement (la partie du
corps située au-dessous du buste
peut-être coincée au fond là
où la crevasse se resserre). Le reste du
matériel utile au sauvetage se trouve dans
le sac et facilement accessible (cordelette de 7mm
de 4/5 m de long, tibloc ou machard, 3 mousquetons
simples et éventuellement une poulie
simple).
Vient ensuite la
démonstration : Jean est encordé
à un sac (qui fait office de skieur) que
l'on balance dans la crevasse. C'est là que
ça se corse, le processus de sauvetage
étant complexe et chaque étape
cruciale.
- Un skieur tombe dans la crevasse ; le skieur en
surface est déstabilisé et chute le
plus souvent avant d'enrayer la chute. Là,
il se cale au sol, skis parallèles. C'est la
phase critique : le skieur doit avant toute chose
se libérer du poids de l'autre skieur
tombé dans la crevasse, et pour cela il doit
mettre au point un système d'ancrage sur
lequel sera transféré ce poids. Sur
terrain neigeux, le plus simple consiste à
déchausser ses skis un par un et à
les planter en croix à la verticale, semelle
orientée vers la crevasse pour éviter
le frottement de la sangle avec les carres lors du
mouflage.
- Lorsque le transfert du poids du skieur dans la
crevasse est réalisé (et placé
sur l'ancrage), le skieur en surface se
décorde. A l'aide d'un machard et d'un
mousqueton, il se longe sur la corde qui part vers
la crevasse et s'approche le plus possible du trou.
Il essaie de dialoguer avec la personne
tombée pour faire un rapide état des
lieux. Si la personne n'est ni blessée ni
sonnée, elle pourra soit remonter seule soit
en tout cas aider la personne qui effectue le
mouflage en surface en s'aidant par exemple de ses
piolets.
- Toujours au niveau de la lèvre de la
crevasse, pensez à mettre des bâtons
(ou piolets) sous la corde de manière
à réduire la "morsure" de la corde
dans la neige qui rend parfois difficile la
manuvre de mouflage.
- Revenir à son point d'ancrage. Si vous
êtes plusieurs en surface, le mieux est de
consolider ce point d'ancrage par un
contre-assurage humain : une personne se longe au
point d'ancrage (skis) et exerce une force inverse
au poids du skieur dans la crevasse. Sinon, si vous
êtes seul, ce contre- assurage peut
être fait à l'aide d'un corps mort
(piolet par exemple) enfoncé dans la neige
en amont du point d'ancrage.
- Il s'agit maintenant de fignoler son
système de hissage, du mouflage simple au
mariner qui permet de démultitplier les
forces par sept. Autant connaître ce dernier,
surtout si c'est le plus léger qui se
retrouve en surface. Lorsque celui-ci est
installé, il n'y a plus qu'à hisser,
et à "réarmer" le système au
fur et à mesure.
A nous
maintenant de répéter
l'opération ! nous nous encordons chacun
à notre sac que Jean balance dans la
crevasse. Dans l'ensemble les gestes ont
été bien compris; en revanche, on
constate à quel point la morsure de la corde
dans la lèvre de la crevasse (malgrè
le bâton placé sous la corde) rend le
hissage difficile quand le sac est proche de la
sortie de la crevasse (le sac inerte ou une
personne inconsciente compliquent les choses. S'il
s'agit d'une personne consciente au bout de la
corde, elle doit pouvoir faciliter
l'opération en déneigeant sur le
haut). On se dit aussi que le mouflage fait
définitivement partie de ces manips qui
s'oublient dès lors qu'elles ne sont pas
très régulièrement
répétées. Des volontaires pour
se mettre au fond du trou ?
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